La laïcité est inscrite dans l’histoire même de la CFDT, puisque notre confédération s’est précisément construite sur le choix de la déconfessionnalisation.
C’est d’abord un idéal politique, qui promeut ce qui est commun à tous, qui rassemble au lieu de diviser, qui garantit l’égalité pour tous par le refus de privilégier telle appartenance spirituelle ou tel particularisme.
À l’école, le « vivre ensemble » n’est pas un choix, c’est une nécessité.
Clés de compréhension
- UNE LAÏCITÉ ANCIENNE ET PACIFIÉE
- LA PROGRESSION DE L'ISLAM FAIT RESURGIR LA QUESTION
- ENSEIGNER LE FAIT RELIGIEUX POUR MIEUX VIVRE ENSEMBLE
DÈS SA CRÉATION EN 1937, et bien qu’ayant intégré une confédération « chrétienne », le Sgen a proclamé son attachement à la laïcité. Il l’a prouvé par son engagement dans la déconfessionnalisation de la CFTC et dans la défense de l’école publique laïque.
UNE LAÏCITÉ ANCIENNE ET PACIFIÉE
Bien qu’elle ne figure pas explicitement dans la devise républicaine, la laïcité est en France considérée, avec raison, comme une des valeurs fondatrices de notre République. La loi de 1905 « relative à la séparation des Églises et de l’État », qui s’est imposée il y a à peine plus d’un siècle, est un épisode décisif des décennies de lutte acharnée entre catholiques et républicains (jusqu’à leur réconciliation scellée dans le sang des tranchées de la Première Guerre mondiale).
Principe inscrit dans notre constitution, la laïcité se décline à travers une multitude de règles juridiques initialement pensées pour limiter l’influence du catholicisme profondément ancré dans
notre histoire et notre société. La trace la plus visible en est le réseau d’églises devenues propriétés des communes tout en restant vouées au culte catholique.
Le terrain d’affrontement privilégié fut longtemps l’école, en raison de la cohabitation d’établissements publics et privés tous financés par l’État, mais la querelle scolaire a été progressivement pacifiée par les lois Debré (1959) puis les accords Lang-Cloupet (1992). Toutefois, l’équilibre actuel fondé sur la reconnaissance d’un enseignement privé sous contrat avec l’État ne nous satisfait pas. Sa remise en cause a provoqué d’importantes mobilisations, en faveur de la « liberté de l’enseignement » en 1984, pour la défense de l’école publique en 1994.
Pour autant, les règles actuelles de la laïcité ne sont contestées par aucune grande tradition religieuse. Tout au plus réclament-elles des aménagements, d’ailleurs globalement tolérés tant que la République n’est pas menacée.
LA PROGRESSION DE L’ISLAM FAIT RESURGIR LA QUESTION
Hier pensée contre l’Église catholique, la laïcité est aujourd’hui bousculée par la progression de l’Islam devenue deuxième religion de France. Mais, liée au poids de l’immigration originaire d’Afrique du Nord et subsaharienne, la religion musulmane est perçue comme « étrangère ». L’école se retrouve sur la ligne de front, cette fois à cause de la confusion entre difficultés d’intégration liées à l’origine sociale et ethnique, et appartenance religieuse.
ce sont les fondamentalismes qui heurtent notre laïcité, et pas une religion particulière
Depuis les premières tensions à Creil en 1989, c’est autour du voile islamique que resurgissent les débats parfois violents sur la laïcité, sa définition et son application, en particulier dans le cadre de l’éducation nationale. Si le Sgen-CFDT a toujours défendu la laïcité comme condition de la paix civile, nous dénonçons ceux qui l’instrumentalisent pour en faire un anti-islamisme qui camoufle mal un racisme hélas banal. On ne peut cependant pas nier que c’’est avec les tenants d’un Islam « dur » que naissent le plus souvent les tensions au quotidien : des parents qui exigent des repas halals, des élèves qui contestent nos approches, scientifiques ou historiques, des collègues qui veulent porter le voile… Mais on oublie un peu vite que des difficultés analogues peuvent surgir avec d’autres religions (juifs orthodoxes, évangélistes…), preuve que ce sont bien les fondamentalismes qui heurtent notre laïcité, et pas une religion particulière. Certaines exigences sont listes…), preuve que ce sont bien les fondamentalismes qui heurtent notre laïcité, et pas une religion particulière. Certaines exigences sont inacceptables. Mais on ne peut se contenter d’y répondre par l’exclusion totale du religieux, ce qui est non seulement ridicule quand il se confond avec des traditions largement partagées et dont la dimension religieuse échappe à la majorité (par exemple fêter Noël) mais aussi ine cace. Cela n’a d’ailleurs jamais été l’intention du législateur qui, depuis l’origine, a préservé autant la liberté d’expression individuelle que la marge d’appréciation des agents publics Mais des règles communes et claires sont indispensables – c’est tout l’intérêt de la récente charte de la laïcité, même si leur mise en œuvre doit laisser une place au dialogue avec les réalités locales, comme le rappelle notamment la loi de 2004.
ENSEIGNER LE FAIT RELIGIEUX POUR MIEUX VIVRE ENSEMBLE
Les sociologues qui prédisaient sa disparition sont obligés de constater que le religieux résiste dans nos sociétés occidentales, même si ses expressions se transforment. Et les replis que l’on observe sont davantage liés aux difficultés d’insertion sociale que rencontrent des populations issues de l’immigration : derrière la laïcité, c’est notre gestion difficile du mulitculturalisme qui est interrogée.
L’idéal républicain a fait du savoir une voie d’émancipation. L’étude scientifique, et donc laïque, des grandes religions est depuis longtemps une réalité dans l’université française. Elle figure aujourd’hui dans les programmes du secondaire et du primaire. Il s’agit de reconnaitre ce que notre culture doit aux religions, à commencer par le christianisme, mais sans exclusive ; il s’agit également d’inscrire la connaissance de l’autre dans la lutte contre les préjugés.
L’enseignement du « fait religieux » ne va pas de soi. Le principe même heurte les nostalgiques d’une laïcité « de combat », mais le principal obstacle est le manque de formation des enseignants. Des ressources existent, mais elles sont sous-utilisées faute d’une véritable intégration dans la formation continue, qui devrait pourtant concerner tous les personnels de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur.
Un bon site pour trouver des ressources sur l’enseignement du fait religieux : http://www.iesr.ephe.sorbonne.fr
Ce dossier est initialement paru dans Profession Éducation, le mensuel du Sgen-CFDT, n° 223 (novembre 2013)