CPE et encadrement : le·la manageur·euse inconnu·e

Un résumé de cet article a paru dans le dossier « Diversité des métiers et notion d'encadrement dans nos champs ministériels » de Profession Éducation, n° 256 (octobre 2017).

Demandez aux étudiant·es pourquoi ils·elles veulent devenir conseiller·es principaux·ales d’éducation (CPE), et il vous sera répondu : « pour accompagner les élèves » ou « pour soutenir les familles ». Jamais « pour encadrer des personnels ».

Pour organiser le service de Vie scolaire, les CPE doivent connaitre le droit du travail…

Nouvellement nommé·e dans un établissement public local d’enseignement (EPLE), une de ses premières tâches est d’établir l’emploi du temps de l’équipe de Vie scolaire. En tenant bien sûr compte des besoins et des spécificités de l’établissement. Mais aussi, et surtout, en toute connaissance du droit du travail, en particulier du temps de travail de personnels de Vie scolaire pouvant relever de statuts différents. Sans oublier, également, de s’appuyer sur les compétences de chacun·e… Bref, être un·e manageur·euse. Parfois avec des équipes de plus de vingt personnes. Belle petite entreprise à gérer au quotidien, à réguler en s’adaptant aux impératifs mais aussi aux imprévus qui surgissent tous les jours.

Mais comment bien accomplir cette mission, en n’étant que « responsable de l’animation de l’équipe de Vie Scolaire » ?

Le positionnement du Sgen-CFDT

Lors des groupes de travail portant sur la circulaire des missions des CPE de 2015, le Sgen-CFDT avait revendiqué le statut de chef·fe de service, responsable de l’équipe de Vie scolaire. Il continue toujours à le revendiquer.

Le Sgen revendique que les CPE aient le statut de chef·fe de service.

Même si le rectorat est l’employeur, le·la CPE est le·la cadre A de l’EPLE gérant ce service à part entière qu’est une Vie Scolaire, et est donc, sans aucune ambiguïté, le·la chef·fe de service, et doit obtenir officiellement ce statut afin de pouvoir intervenir sur tous les points de management d’un service, au-delà de la simple animation annoncée dans la circulaire de 2015.

Ce que disent les différents textes sur la mission d’encadrement des CPE

Reprenons les différents textes concernant les CPE pour en extraire les parties concernant l’encadrement.

Tout d’abord, la circulaire no 82-482 du 28 octobre 1982 y consacre une seule petite phrase :

« Le conseiller d’éducation et le conseiller principal d’éducation sont les responsables de l’animation de l’équipe (en collégialité si l’établissement comporte plusieurs CE – CPE), qu’ils constituent avec les autres conseillers d’éducation ou les conseillers principaux d’éducation, les personnels de surveillance, les maîtres de demi-pension et les maîtres au pair, équipe sur laquelle repose, en grande partie, l’organisation et l’animation de la vie scolaire. »

Puis, dans l’arrêté du 1er juillet 2013 relatif au référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l’éducation sur lequel se sont appuyés les groupes de travail pour la grille de compte-rendu des rendez vous de carrière dans le cadre du protocole des parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) :

« C4. Assurer la responsabilité de l’organisation et de l’animation de l’équipe de vie scolaire

Organiser les activités et les emplois du temps des personnels de la vie scolaire dans un souci de continuité, de cohérence et d’efficacité du service.

Préparer et conduire les réunions de coordination et d’organisation de l’équipe et en formaliser les conclusions.

Évaluer les besoins de formation des membres de l’équipe et proposer des formations. »

Ces compétences se trouvent résumées dans les grilles de compte-rendu des rendez vous de carrière en ces termes :« Assurer l’animation de l’équipe de vie scolaire et organiser son activité »

Enfin, dans la circulaire no 2015-139 du 10 aout 2015 la notion d’encadrement est davantage présente car elle figure dans deux paragraphes différents, mais elle n’entraîne pas d’évolution réelle des missions :

« b) Contribuer à la qualité du climat scolaire

Les CPE sont responsables de l’organisation et de l’animation de l’équipe de vie scolaire. Ils encadrent cette équipe et organisent son activité en vue d’assurer, avec le concours de l’ensemble de la communauté éducative, l’animation et l’encadrement éducatifs, la sécurité des élèves et le suivi de l’absentéisme et en vue d’apporter une aide au travail personnel des élèves.

  1. c) L’animation de l’équipe vie scolaire
    Pour exercer leurs missions et participer à la mise en œuvre de la politique éducative de l’établissement, les CPE s’appuient sur l’équipe de vie scolaire. Dans le cadre du volet éducatif du projet d’établissement qu’ils élaborent avec l’ensemble des membres de la communauté scolaire, les CPE précisent les tâches et les emplois du temps de chaque membre de l’équipe de vie scolaire dans un souci de continuité, de cohérence et d’efficacité du service à rendre mais aussi dans le respect des personnes et des règles régissant leurs conditions d’exercice. Ils repèrent les besoins de formation de ces personnels et proposent des actions de formation au chef d’établissement. Ils peuvent contribuer à leur évaluation. »

Les incohérences

Donc, aucun texte ne positionne le·la CPE comme chef·fe de service de la Vie scolaire, ce qu’il·elle est dans les faits. Une situation paradoxale qui a des conséquences aberrantes. Par exemple, il·elle n’est pas statutairement en charge de l’embauche de ses personnels. Selon la politique de l’établissement, il·elle y participe, ou pas ; il·elle décide du renouvellement des AED, ou pas ! Il·elle peut – et non doit – participer à leur évaluation. Pourtant, qui connaît le mieux les personnels de Vie scolaire qu’un·e CPE qui travaille à leurs côtés tous les jours ? En particulier dans le cadre du bilan de compétences qui doit être effectué à la fin des contrats aidés « emplois de vie scolaire » (EVS).

Des incohérences qui sont autant de freins… au bon climat et au suivi des élèves.

Par contre, il·elle doit repérer leur besoin en formation. Sans l’avoir obligatoirement évalué avant : sur quoi se fonde alors son diagnostic de besoin de formation ? Des incohérences qui sont autant de freins à une sérénité et une cohérence indispensables pour que l’équipe participe efficacement au bon climat scolaire et au suivi des élèves.