Depuis janvier 2021, le ministère de l’Éducation nationale organise enfin des réunions régulières avec les syndicats pour faire un point sur la situation sanitaire. Pour le Sgen-CFDT, c’est un premier pas, mais il convient maintenant de donner de la visibilité aux agents et aux élèves.
Covid-19 – La ministre de la fonction publique, Amélie de Montchalin, organise chaque semaine depuis plusieurs mois une visioconférence avec les organisations syndicales représentatives dans la fonction publique. La CFDT fonction publique en rend compte sur son site. Les interventions de la CFDT lors de ces réunions ont permis d’obtenir des réponses, des avancées pour les agents par exemple sur la suspension du jour de carence.
A l’inverse, ce n’est que depuis le mois de janvier 2021 que le ministère de l’Éducation nationale organise régulièrement ce type de réunion et non plus seulement au coup par coup. Retour sur ces échanges et sur les propositions portées par le Sgen-CFDT.
Covid : Suivi des statistiques ministérielles
Cas Covid déclarés et fermetures de classes ou d’établissements
A chacune des réunions, le ministère présente les statistiques de cas covid déclarés dans les établissements scolaires et remontées par les rectorats, de classes et d’établissements scolaires fermés. Contrairement à ce qui est souvent pratiquée dans la communication médiatique, lors de ces réunions, le ministère rappelle que ces chiffres de cas covid ne sont pas des données épidémiologiques comme celles de Santé publique France. La réalité des cas de covid confirmés pour des enfants scolarisés se situant entre les données ministérielles et celles de Santé publique France.
L’interprétation des chiffres ministériels n’a de sens qu’en termes d’évolution.
De ce point de vue, les données ministérielles montrent que dans les établissements scolaires comme dans le reste de la société, la circulation du virus est à un plateau plus haut qu’en début d’année scolaire. Les données n’étant communiquées que nationalement, on ne peut pas en tirer davantage d’information sur la situation épidémique.
Campagnes de tests
Le ministère fait désormais aussi une information sur les tests pratiqués. A l’heure actuelle, les campagnes de tests rencontrent un meilleur accueil dans les établissements dans lesquels un ou plusieurs cas de covid ont été confirmés. Lorsque des tests sont proposés « à l’aveugle », 10 à 20% seulement des communautés éducatives s’y soumettent.
Pour le Sgen-CFDT, cela soulève plusieurs questions :
- Comment organiser ces campagnes pour qu’elles aient plus de succès ? Communication en amont aux parents d’élèves et aux personnels, organisation de la passation des tests (lieux et horaires) pour faciliter la participation de chacun.e…
- Le taux de positivité de ces tests, qui plus est calculé nationalement, n’est pas aisé à interpréter et il faut se garder d’en tirer des conclusions hâtives sur la circulation du virus au sein de la population scolaire. En effet, la double stratégie de test est différente de celle pratiquée dans l’ensemble de la population. Nous avons demandé des études plus scientifiques sur le sujet et à tout le moins la distinction entre le taux de positivité lorsque les tests sont fait suite à des cas confirmé de covid ou dans le cadre de campagne « à l’aveugle », et leur comparaison avec le taux de positivité constaté dans le territoire des établissements.
Mieux cerner l’efficacité des mesures prises et celles à prendre encore…
Depuis le début de l’année scolaire, le Sgen-CFDT demande que de nouvelles études scientifiques soient conduites sur la circulation du virus au sein des communautés éducatives et parmi les proches des élèves et des personnels. Depuis l’étude de l’Institut Pasteur sur le cluster de Crépy-En-Valois en février-mars 2020 nous ne disposons pas d’étude scientifique précise sur le sujet. Or depuis l’hiver 2020, le contexte a changé, notamment avec le port du masque, la mise à disposition de gel hydroalcoolique et, dans certains établissements, l’hybridation de l’enseignement.
Le ministère a finalement suivi les propositions du Sgen-CFDT et d’autres organisations syndicales. Des études scientifiques sont en cours qui devraient nous permettre d’en savoir plus et de mieux cerner l’efficacité des mesures prises et celles à prendre encore.
Covid : Suivi des évolutions du protocole sanitaire
Le ministère ne conduit toujours pas un dialogue social en amont des modifications du protocole sanitaire. Nous le demandons pourtant depuis plusieurs mois. Le Sgen-CFDT en avait fait la proposition au responsable de la cellule bâti scolaire (chargée de la rédaction des protocoles sanitaires) avant l’été 2020.
Lors de la dernière réunion le mardi 16 février 2021, le ministère a expliqué mettre en œuvre les préconisations des autorités de santé, et que seules les évolutions de ces préconisations avaient justifié la toute dernière modification du protocole.
Le Sgen-CFDT a exprimé ses doutes sur l’évolution du protocole au sujet du variant dit anglais, le distinguant des variants dits brésilien et sud-africain. A défaut de disposer d’avis récent du conseil scientifique, nous avions comme information un variant anglais plus contagieux. Les connaissances scientifiques ne sont pas stabilisées et il semble maintenant que le variant anglais ne soit pas plus contagieux en termes de risque de transmission pour une durée et des conditions d’exposition données, mais qu’une personne porteuse reste contagieuse plus longtemps. Or l’évolution du protocole ne prévoit pas d’allonger la durée d’isolement des cas confirmés et cas contacts. Après les annonces d’Olivier Véran jeudi 18 février 2021 au soir, le protocole devrait de nouveau être modifié pour passer à 10 jours d’isolement des cas confirmés de Covid19.
Une fois de plus, si chacun.e peut comprendre que la gestion d’une pandémie sur laquelle les connaissances scientifiques sont en partie en construction est difficile, tout le monde a besoin de sens. Modifier le protocole sans expliquer les fondements scientifiques qui le justifient ne peut que générer de la défiance.
Tout le monde a besoin de sens…
Nous sommes intervenus à nouveau sur la problématique des critères et procédures de fermetures de classe ou d’établissement. Les syndicats académiques font en effet état de situation dans lesquelles il y a désaccord entre les directeur.trice.s, chef.fe.s d’établissement, les DASEN, les services préfectoraux et les ARS. Et finalement, les règles ne semblent pas appliquées de la même manière partout, des personnels se retrouvent en porte-à-faux.
Par ailleurs, il arrive que des écoles et établissements soient maintenus ouverts alors qu’il ne reste qu’une ou deux classes ouvertes à l’enseignement en présentiel. Une fois de plus, cela n’a pas grand-sens.
Le Sgen-CFDT a demandé au ministère de réaliser un suivi des cas de covid longs parmi ses agents afin d’améliorer leur prise en charge et aussi d’en tirer les mesures RH en termes de remplacement par exemple.
Sortir du tout ou rien et prendre des mesures d’aménagement nécessaires
Pour le Sgen-CFDT, la question du fonctionnement du système éducatif pendant cette pandémie ne peut se résumer à un débat fermeture totale/ouverture totale.
Pour nous, une fermeture totale des établissements peut se justifier dans un contexte de confinement de la population. Il n’y aurait sans doute pas grand-sens à fermer tous les établissements scolaires sans autres mesures pour l’ensemble de la population afin de ralentir davantage la circulation du virus. Dans ce cadre, et selon la dynamique épidémique si la période de fermeture inclue une période de vacances scolaires, cela minimise les effets sur la scolarité des élèves. Ce n’est pour le moment pas la mesure retenue par le gouvernement.
La fermeture d’établissements ne doit cependant pas être écartée par principe. Lorsque la situation épidémique sur un territoire et dans l’établissement montre une circulation accrue du virus, lorsque les acteurs locaux estiment que le protocole sanitaire ne peut être mis en œuvre ou ne suffit plus à faire face à la circulation du virus, il faut pouvoir fermer.
Sortir du tout ou rien suppose de prendre des mesures d’adaptation.
Aujourd’hui et dans les mois qui viennent, sortir du tout ou rien suppose de prendre des mesures d’adaptation. Le Sgen-CFDT en propose plusieurs depuis longtemps.
Aménagement des locaux scolaires
Dans la lutte contre la propagation du virus, la ventilation des lieux clos est un élément important, et longtemps sous-estimé par le gouvernement. Or nous constatons toujours que rare sont les cantines scolaires qui disposent de système de ventilation efficace, et que des salles de classe ne peuvent être aérées faute de fenêtres en bon état. S’il est désormais préconisé d’installer des détecteurs de CO2, il n’y a pas de suivi et d’accompagnement du déploiement de ces détecteurs… et les installer sans se soucier de la possibilité même de ventiler ne permettra pas une meilleure mise en œuvre de ce geste barrière important.
Dans de nombreux établissements scolaires, les sanitaires restent sous-dimensionnés par rapport au nombre de personnes.
Le plan de relance comporte un volet sur la rénovation des bâtiments publics devrait permettre d’enclencher les travaux nécessaires. Le Sgen-CFDT, la Fep-CFDT et Interco-CFDT font le constat que ces travaux ne sont pas en cours, ni programmé partout. Nous avons adressé un courrier au ministre de l’Education nationale, à la ministre de la Cohésion des territoires et au porte-parole de la coordination des employeurs territoriaux à ce sujet.
Meilleur équipement des personnels
Le Sgen-CFDT revendique des masques plus protecteurs pour les personnels, en particulier pour celles et ceux qui travaillent avec des élèves ne portant pas le masque (par exemple à l’école maternelle), les AED et AESH qui travaillent sur le temps de cantine, et dont les missions les amènent à ne pas pouvoir respecter le principe de distanciation physique avec les élèves.
Nous constatons que le réassort en masque n’est pas assuré partout. L’ensemble des services de l’Éducation nationale doivent pouvoir améliorer la chaîne logistique afin que les différents établissements disposent de dotations renouvelées et suffisantes.
Mieux mobiliser les personnels de santé scolaire
Les médecins scolaires de secteur sont trop souvent exclu.e.s des informations sur la situation épidémique dans les établissements de leur ressort. Le ministère doit revoir l’organisation du travail afin de permettre aux médecins scolaires d’être davantage en appui des équipes dans les établissements. Il faut aussi que les médecins puissent poursuivre leurs missions aux côtés des familles, des élèves et des acteurs de l’école, en grandes difficultés dans cette période de crise sanitaire, pour veiller aux mieux à la santé individuelle des élèves les plus fragiles, à la continuité pédagogique et à l’adaptation de la scolarité dans un contexte de stress et de désorganisation à laquelle il faut sans cesse s’adapter. Cela suppose de se donner les moyens de recruter afin de pourvoir les postes.
Les infirmiers et infirmières scolaires sont sur-sollicité.e.s dans la période. Là aussi le schéma d’emploi n’est pas adapté aux enjeux du moment. Ces personnels devraient pouvoir poursuivre leurs missions « ordinaires » qui s’intensifient dans le contexte que nous vivons et contribuer aussi en lien avec les médecins scolaires à l’accompagnement des équipes dans la mise en œuvre du protocole sanitaire, le déploiement des campagnes de test, et demain de vaccination.
Revoir le schéma d’emploi
Le Sgen-CFDT demande la prorogation des contrats d’enseignant.e.s du premier degré et d’AED qui ont été recruté.e.s pour la période de novembre à février. La dynamique épidémique montre que nous aurons besoin de ces personnels dans les mois qui viennent.
Nous demandons aussi de revoir le schéma d’emplois pour 2021 non seulement pour les enseignant.e.s mais aussi pour les personnels sociaux et de santé, les CPE et les PsyEN.
Lire à ce sujet notre déclaration au comité technique ministériel du 9 février 2021.
Structurer enfin le dialogue social sur les adaptations pédagogiques à la situation sanitaire
Faire fonctionner le système éducatif pendant la pandémie suppose aussi d’adresser des questions pédagogiques. Même en l’absence de fermetures de classe ou d’établissement, même dans les classes et établissements qui ne fonctionnent pas en mode hybride (alternant cours en présentiel avec un groupe d’élèves, et travail à distance lorsqu’un groupe d’élèves n’est pas en classe avec ses enseignant.e.s), l’année scolaire est perturbée, parce que chacun.e peut-être cas contact plusieurs fois au cours de l’année.
A ne pas prendre en compte la réalité, on place les personnels et les élèves dans une situation difficile…
A ne pas prendre en compte cette réalité, on place les personnels et les élèves dans une situation difficile : comment traiter l’ensemble du programme comme si l’année était normale alors qu’elle ne l’est pas. Pour le Sgen-CFDT, il faut penser toutes les perturbations que l’épidémie impose au système éducatif à la fois pour l’année en cours mais aussi en prévision de l’année 2021-2022 car il n’est pas exclu qu’elle soit aussi perturbée par l’épidémie. Aménagement de la passation des examens, aménagement des programmes d’enseignement ou plutôt des attendus en fin d’année scolaire pour pouvoir s’adapter à ce que les enseignant.e.s ont d’ores et déjà travaillé avec les élèves… toutes ces questions doivent être travaillées. Cela suppose que le ministère y travaille, mais surtout qu’il permette aux équipes de s’emparer de ces sujets et leur donne le temps d’y travailler.
Préparer tous les scenarii, même ceux qu’on ne souhaiterait pas voir se réaliser…
Le Sgen-CFDT demande l’ouverture de discussion sur ces sujets depuis plusieurs mois car nous considérons que le seul moyen d’anticiper, de donner de la visibilité et de s’adapter aux conditions épidémiques suppose de préparer tous les scenarii, même ceux qu’on ne souhaiterait pas voir se réaliser. Le but étant de redonner de la sérénité à chacun.e et que la pandémie ait le moins d’impact négatif sur les parcours des élèves.
Le ministère a enfin annoncé la mise en place d’un groupe de travail sous l’égide de la DGESCO pour travailler à ces sujets avec les organisations syndicales. Démarrage prévu début mars.